Opéra poussière – 2023/2024

Texte de Jean D’Amérique – Texte publié aux Editions Théâtrales, éditeur et agent de l’auteur. Prix RFI Théâtre 2021 et Jacques-Scherer 2022.

« J’ai une grande opportunité d’avoir la littérature comme outil, comme arme. Cela me permet d’abord d’avoir une voix dans la société. Je fais beaucoup d’interventions dans les écoles en France. Quand je vais voir les jeunes, j’essaie de les convaincre que c’est possible de prendre la parole dans la société. Surtout par la littérature. C’est un espace de liberté, c’est un outil de parole qui est puissant. On peut s’en emparer pour faire quelque chose d’intéressant et utile. J’ai envie de dire que je suis un influenceur de la conscience avec la littérature. J’espère participer à une transformation de la société en agissant par l’esprit des gens, par les mots.  Si on veut vraiment habiter ce monde, il faut s’engager. On n’a pas le choix… » Jean D’Amérique

Origine du projet

Dans Critique de la raison nègre, Achille Mbembe, nous dit « Lorsqu’il s’agit de dire le monde dans la langue de tous, il existe, en revanche, des rapports de force au sein de ces traditions, et une partie de notre travail a consisté à peser sur ses frictions internes, à en appeler au décentrement, non pour creuser l’écart entre l’Afrique et le Monde, mais pour permettre qu’émergent, dans une relative clarté, les exigences neuves d’une possible universalité« .

Jean-Erns Marie-Louise, metteur en scène de la Thymélé, a été invitée à participer au festival des Récréâtrales 2022 avec la mise en lecture de 3 textes dont « Opéra poussière » de Jean D’Amérique. Le principe consistait à travailler avec les stagiaires du Labo Elan venant de différents pays d’Afrique et de la Caraïbe. Les textes ont créé l’opportunité de la rencontre artistique. Les discussions autour des textes ont permis de confronter les points de vue et de comprendre les pratiques artistiques de chacun. La joie de créer et de partager a rassemblé et rapproché certains même en dehors des temps de répétitions. Il a été envisagé une continuité de collaboration après festival. Les motivations qui nous ont poussé à vouloir aller plus loin dans ce projet « Opéra poussière » sont que nous avons trouvé des résonances multiples en ce qui nous traverse dans nos interrogations sociétales.

Le travail de la compagnie, est axé principalement sur les récits manquants, ce qui nous a amené aux auteures telles que Audrey Célestin, Belle Hooks, Anne Larue, Norman Ajari, Houria Bouteldja, Maya Anjelou, Judith Butler, Nina Bouraoui, Toni Morrison, Roxane Gay, Donna Haraway, Rachele Borghi et Monique Wittig. Ce travail de recherches a abouti à un spectacle autour des oeuvres de ces femmes auteures. Opéra poussière s’inscrit dans une suite logique.

En ce qui concerne les Tréteaux du Bénin, nous avons des similitudes dans nos cosmologies respectives, en effet Haïti est une petite soeur du royaume du Dahomey. Pour la compagnie Kurun’Kuw, nous avons fait le rapprochement avec les Agojié considérées comme les amazones du Dahomey. Sanite Bélair, l’héroïne du texte, est sans doute une descente des Agojié du Bénin dans son combat pour la liberté. Dans Opéra poussière il y a plusieurs combats : le combat de la liberté, le combat de la représentation de la femme dans l’espace public au sens large. Il est sous-entendu dans le texte, les combats silencieux des femmes en tout temps qu’elles doivent rompre pour que, enfin, la parole soit libérée et reconnue.

La rencontre avec L’association Baraka Global Arts s’est faite par l’intermédiaire du jeune dramaturge et comédien Cedric Mabudu. Il nous a longuement parlé de son travail au sein de l’association. Nous avons échangé aussi avec son fondateur Mr Saliou Sarr de son nom d’artiste Alibeta, pour la cie la Thymélé, c’est une belle opportunité et un honneur d’accompagner la dynamique de cette association et de sa branche théâtrale La Frabrique des Possibles. Cette association démontre une grande capacité à fédérer. Elle propose aussi un travail autour de la recherche théâtrale, qui fait partie de l’ADN de la Thymélé, que nous trouvons galvanisant. Cette collaboration se fera étape par étape, la création d’Opéra poussière, représente déjà notre deuxième étape et espace de confiance, afin d’envisager sereinement ensemble d’autres types de collaboration à l’avenir.

« Les femmes ont besoin de savoir qu’elles peuvent réfuter les définitions de leurs réalités établies par les puissants, et qu’elles peuvent le faire même si elles sont pauvres, exploitées ou piégées dans des situations d’oppressions. Elles ont besoin de savoir que l’exercice de ce pouvoir personnel élémentaire est un acte de résistance et de force. Beaucoup de femmes pauvres et exploitées, en particulier des femmes non blanches, auraient été incapables de développer une estime positive d’elles-mêmes si elles n’avaient pas exercé leur pouvoir de rejeter les définitions de leurs réalités selon les puissants. » Bell Hooks « De la marge au centre »

La sous-représentation des femmes dans les manuels d’histoires est un sujet polémique, et nous croyons qu’avec cette création nous apporterons notre pierre à l’édifice. Jean D’Amérique, à partir d’une thématique universelle qui est le combat des femmes pour leurs pleins droits, fait du théâtre en amenant ce combat dans une poétique revendicative.

Notes d’intentions du metteur en scène

en milieu scolaire en France. Il explique aux jeunes que c’est important et possible de prendre la parole dans la société. Lui, le fait à travers la poésie de son écriture et espère participer à la transformation de la société en agissant avec les mots. Il serait un influenceur de la conscience par la littérature.

Le texte « Opéra poussière », prix RFI Théâtre 2021 et prix Jacques-Scherer 2022, publié aux Editions les Théâtrales éditeur et agent de l’auteur, met en scène une femme qui prit part à la révolution haïtienne contre l’expédition napoléonienne qui voulait rétablir l’esclavage à St Domingue. Ce texte traite de l’Histoire, certes, mais aussi de la condition de la femme, sujet oh combien universel. En effet, on parle souvent des héros de guerre mais si peu souvent des héroïnes de l’Histoire. Or, les femmes ont souvent œuvré dans l’ombre des hommes, héros des indépendances ! Sanite Bélair revient du pays des ossements pour revendiquer sa place et celle de toutes les femmes combattantes, au côté des hommes et non plus dans leur ombre. Ce texte nous touche par ce qu’il décrit, par sa langue, sa prise de position qui dénonce toutes les oppressions et dominations qu’ont subies les femmes noires, esclaves et combattantes ; et parce que l’auteur nous le livre avec une pointe d’humour. L’Histoire récente nous montre que le Monde est toujours en perpétuel mouvement, rien n’est jamais acquis et surtout pas les droits des femmes, alors ce texte c’est comme une piqûre de rappel à ne jamais baisser les armes.

La voix se déploie dans le noir du plateau ocre, accompagnée par la guitare de Ghassen Fendri. C’est une mélopée faite d’onomatopées, de mélodies, de chants rituels et de texte. Notre opéra prend corps et danse tout en créant l’espace de jeu… Une grande voile pourpre…

Notre scénographie sera une métaphore de légèreté et de choses récupérées. Notre idée est de pouvoir utiliser des matériaux que nous pourrions retrouver dans tous les endroits de diffusion. Comme nous serons plusieurs à nous déplacer sur différents continents, nous avons fait ce choix afin de compenser notre impact environnemental.

Au début de la pièce, nous sommes au pays du peuple des ossements. Les comédien.ne.s seront parés de masques découpés dans du carton et peints à la manière de Picasso qui s’est lui-même inspiré des masques africains.

Sanite Bélair, fait la demande d’un visa pour rejoindre le monde des vivants qu’elle a quitté deux siècles avant. Elle se prépare à un autre combat, qui est, de prendre la place qui lui revient aux côtés des Pères de l’indépendance.

Cet Opéra poussière est aussi une métaphore de la place des femmes dans l’espace public, gouverné par les hommes. Cette révolutionnaire, figure historique, Sanite Bélair, sous la plume de Jean D’Amérique, devient une arme de pointe automatique, elle s’exprime par rafales poétiques, ces mots nous pénètrent partout dans le corps. Voix messianique, voix mémoire, voix qui se déploie sur toutes les surfaces de communication moderne, cette voix d’outre-tombe s’infiltre dans tous les canaux de communication contemporaine. Elle prend sa place, de force, parmi les statues des Pères de l’indépendance d’Haïti.

Nous souhaitons laisser une mémoire de cette traversée humaine et artistique, pour ce faire nous inviterons une réalisatrice afin de dresser un bilan par l’image c’est à dire un documentaire de création.  

L’art n’est pas velléité mais réalisation. Pierre Francastelle

    Jean-Erns Marie-Louise

Production La Thymélé
Coproductions : Ville de Fort de France – plateforme des Récréâtrales
Soutien : Dac et Préfecture de Martinique – Ministère de la Culture et des Outre-mer

Calendrier prévisionnel
4ème trimestre 2023 – résidence de création aux Récréâtrales à Ouagadougou-Burkina Faso avec sortie de résidence
Juin/juillet 2024 – résidence de création au Sermac/Ville de Fort de France avec représentations dans le cadre du festival culturel de la ville de Fort de France
4ème trimestre 2024 – Festival des Récréâtrales à Ouagadoutou – Burkina Faso

Equipe envisagée

Metteur en scène, Jean-Erns Marie-Louise – France/Martinique
Musicien-compositeur, Ghassen Fendri – France
Comédien.nes, Véronique Kanor – France/Martinique, Félicité Notson Kodjo-Atsou – Togo , Cédric Mabudu – Sénégal, Nicolas Moumbounou – France/Congo, Moussa Sidibé-Mali – Gérard Toholin – Bénin, Dalila Voundi « Abishag » – France/Martinique
Créateur lumière, Hugo Fleurance – France
Costumes, décor, accessoires, Delphine Rigollaud – France
Administratrice de production, Frédérique Yaghaian – France/Guadeloupe